Une personne insérant un appareil de soins auditifs dans son oreille.

Soins auditifs : pourquoi de nombreux Français ne souhaitent pas être appareillés ?

Les troubles auditifs sont un problème réel en France, notamment la presbyacousie. C’est un trouble qui a touché environ 11 % des Français en 2018. il existe des prothèses pour remédier à cette difficulté, mais malheureusement seulement un Français sur quatre est appareillé. Qu’est-ce qui explique ce phénomène ? À priori, il semble que ce soit les prix prohibitifs des prothèses auditives. Plusieurs sondages ont révélé que les malentendants n’ont pas les moyens financiers d’accéder aux prothèses et refusent donc d’être appareillés.

Le prix : première raison du non-appareillage auditif des malentendants

La presbyacousie est un trouble auditif intervenant avec l’âge. En d’autres termes, il s’agit d’une perte progressive de l’ouïe liée au vieillissement. En France, nombreuses sont les personnes âgées qui en souffrent, ce qui en fait un problème de santé important. Et comme personnes âgées est souvent synonyme de perte de revenu, les soins auditifs demeurent encore difficilement accessibles.

En effet, le coût d’un appareil auditif, qui est stable depuis plusieurs années, est de 1 550 euros par oreille, ce qui représente la somme de 3 100 euros en moyenne pour un appareillage bilatéral, c’est-à-dire pour les deux oreilles. Ce prix représente le coût de plusieurs prestations réunies. Il y a bien sûr le prix de l’appareil auditif, mais aussi la consultation et le premier réglage, et enfin le suivi de ce réglage pendant la durée de vie de l’appareil. Ce prix entraîne souvent le refus d’être appareillé par beaucoup de patients, d’autant que d’après plusieurs sondages menés par divers cabinets d’étude, les appareils bilatéraux représentent en moyenne 80 % des ventes de prothèses auditives.

Concernant le suivi, une chose curieuse a été mise en relief par certaines études. Malgré le fait qu’il soit payé d’avance, il a rarement lieu. C’est souvent le cas chez les sujets presbyacousiques. Par contre, il est beaucoup plus respecté chez les sujets atteints de surdité sévère ou profonde. Dans le cas contraire, l’appareillage auditif ne servirait à rien. Un autre aspect important qu’il faut noter, c’est que ces appareils doivent être changés tous les 5 ans. C’est aussi une des raisons qui peut expliquer le refus d’être appareillé.

En outre, la Sécu et les assurances complémentaires santé ne sont pas d’une grande aide aux patients. La Sécu ne rembourse que 120 euros par oreille et les complémentaires santé quant à elles n’offrent qu’une prise en charge de 350 euros sur le prix d’une prothèse auditive bilatérale. De ce fait, le reste à charge pour le patient avoisine les 65 % du prix d’une prothèse. Il est alors difficile pour de nombreux Français de s’équiper dans ces conditions.

Si la prise en charge est faible, le profit réalisé sur une vente de prothèse quant à lui est très élevé. Certaines études l’estiment à environ 242 euros. Ce climat n’encourage pas du tout les personnes ayant un handicap auditif à s’investir et à investir dans l’appareillage. C’est une situation qui, à long terme, peut être à l’origine de troubles plus sévères, notamment de maladies neurodégénératives.

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Le numerus clausus : un autre responsable du prix des soins auditifs

Le problème du numerus clausus (numéro clos en latin) est dû à un système hérité du début des années 70 qui ne permet qu’à un nombre restreint d’étudiants en médecine à passer le cap de la première année et ainsi à continuer leurs études. On estime alors qu’environ 6 étudiants sur sept n’arrivent pas à accéder en deuxième année de médecine. C’est une chose qui perdure jusqu’aujourd’hui et qui a créé au fil des ans un manque de médecins et de spécialistes dans le domaine de la santé.

Dans le domaine des soins auditifs, c’est une pénurie d’audioprothésistes que le numerus clausus a engendrée. Cela a permis à ces professionnels de santé de maintenir leurs prérogatives. Résultat, les soins auditifs reviennent chers, voire très chers aux clients. Toutefois, ces deux dernières années, le gouvernement s’est de plus en plus penché sur la question. Son objectif est de supprimer le numerus clausus afin de résoudre certains problèmes, dont le manque de médecins.

Le RAC 0 : la prise en charge des soins auditifs et ses évolutions récentes

Le remboursement des appareils auditifs en France souffre de nombreuses plaintes, et ce, depuis des années. Cependant, le paysage change peu à peu depuis 2018, avec l’arrivée annoncée du « Reste à charge 0 » ou RAC 0 et de la réforme 100 % santé. Dans un premier temps, le nombre de classes pour ces appareils est passé de 4 (A, B, C et D) à 2 (I et II). Les fabricants de prothèses auditives devront donc référencer à nouveau leurs produits. Les appareils de la classe I sont dits de « milieu de gamme ». Ce sont eux qui bénéficient du reste à charge 0, c’est-à-dire qu’ils sont entièrement remboursables.

Toutefois, la classe I ne regroupe actuellement que 30 % des achats d’audioprothèses. Même si le RAC 0 représente une lueur d’espoir pour les patients, il reste encore du chemin à parcourir. En effet, selon plusieurs sources, il y a actuellement 100 prothèses auditives différentes en vente. Parmi ces 100, 12 vont disparaître et il n’en restera plus que 88 qui seront réparties entre ces deux classes. Cependant, seulement 12 seront répertoriées dans la classe I et les 76 autres dans la classe II.

Les audioprothèses de la classe I ne représentent donc qu’un faible pourcentage et ne font pas partie des plus avancées. Les appareils de la classe I bénéficieront également de tarifs plafonnés. Par contre, ceux de la classe II auront des tarifs libres. Ces tarifs libres pourraient même dépasser le prix qui est actuellement pratiqué, soit 1 500 euros par oreille. Par ailleurs, le RAC 0 n’entrera en vigueur qu’en 2021. Cela dit, le plafonnement du prix des prothèses de la classe I a commencé depuis 2019.

De même, il faut savoir que l’application de la mesure sera progressive. Le prix des appareils du RAC 0 est limité à 1 300 en 2019 (contre 1 500 en 2018) et à 1 100 euros cette année. À partir de 2021, les audioprothésistes appartenant au dispositif RAC 0 vendront leurs appareils à 950 euros. Ce prix sera entièrement remboursé par la Sécurité sociale et la mutuelle du patient. À long terme, le dispositif est amené à évoluer. D’autres avantages pourraient alors apparaître dans les années à venir.

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